Ecluse de la Barquette (Manche)

Les villes de Normandie pendant les combats de 1944

Libération : 6 juin 1944

Unités engagées :

Drapeau américain 501st Parachute Infantry Regiment, 101st Airborne Division

Drapeau américain 506th Parachute Infantry Regiment, 101st Airborne Division

Drapeau américain 327th Glider Infantry Regiment, 101st Airborne Division

Drapeau nazi III/Grenadier-Regiment 1058, 91. Infanterie Division

Drapeau nazi Fallschirmjäger Regiment 6, 91. Infanterie Division

Historique :

La Barquette est un lieu-dit appartenant à la commune de Carentan. Il se compose de trois bâtiments et d’une écluse sur la Douve qui représente un point clé du secteur étant donné que toute la région est inondée par les Allemands dès 1943. Lors de la planification de l’opération Overlord, les Alliés font des différents points de franchissement sur la Douve des objectifs prioritaires le Jour-J : l’écluse de La Barquette en fait partie.

Le secteur est défendu par les soldats allemands du 3ème bataillon du Grenadier-Regiment 1058 (91. Infanterie Division). C’est le 1er bataillon du 501st Parachute Infantry Regiment (101st Airborne Division) aux ordres du lieutenant-colonel Robert C. Caroll qui reçoit les missions de s’emparer et de tenir l’écluse aux premières heures du 6 juin 1944. La Barquette doit être sous contrôle pour empêcher les Allemands aussi bien de contre-attaquer à partir de ce point de franchissement que d’ouvrir l’écluse. En effet, si les écluses sont ouvertes à marée haute, ceci a pour effet d’inonder largement les terres entre Saint-Côme-du-Mont et Carentan, limitant ainsi les possibilités de déplacement.

Afin d’accéder rapidement à La Barquette, le 1er bataillon du 501st PIR est prévu d’être parachuté à environ un kilomètre au nord de l’écluse de La Barquette, sur la zone de saut codée « D ». Le largage débute le 6 juin 1944 à 1 heure 26 et les deux-tiers des soldats aéroportés atterrissent sur ou à proximité de la « drop zone » qui est déjà partiellement inondée. Les cadres du 1/501st PIR sont durement touchés lors du saut : le lieutenant-colonel Caroll est tué, son adjoint le Major Phillip Gage est blessé et fait prisonnier, et les commandants d’unité sont introuvables. Cependant, le chef de corps du 501st PIR, le colonel Howard R. Johnson, atterri par erreur à proximité de La Barquette et prend l’initiative de s’en emparer lui-même. Dans les heures qui suivent le saut, « Jumpy » Johnson rassemble autant de parachutistes que possible, provenant de différentes compagnies (ainsi que du 506th PIR). A l’aube, 150 parachutistes sont sous ses ordres et le chef de corps décide de débuter la progression en direction de l’écluse de La Barquette. Il ordonne à 50 de ses hommes commandés par le lieutenant Farrel, observateur avancé de l’artillerie de marine, de s’emparer du secteur tandis que les 100 autres restent en réserve d’intervention. Les éléments d’assaut franchissent l’écluse et s’installent sur l’autre rive du canal, s’emparant sans difficulté de La Barquette et creusant rapidement des abris dans l’éventualité d’une contre-attaque adverse. La maison du gardien de l’écluse, abandonnée, est investie par les parachutistes.

Pendant toute la journée du 6 juin, les parachutistes américains tenant l’écluse sont soumis à d’importants tirs d’artillerie et de mortiers provenant aussi bien de la région est de Carentan que de Saint-Côme-du-Mont. Le lieutenant Farrel demande et obtient un appui feu des canons de 203 mm du croiseur lourd USS Quincy : cette intervention limite considérablement la densité des tirs allemands sur l’écluse de La Barquette. Le colonel Johnson en profite pour tenter d’élargir le périmètre qu’il tient à hauteur de l’écluse et ordonne à ses éléments le plus au sud d’effectuer un bon de 200 mètres. A 20 heures, la position de La Barquette est tenue par 280 parachutistes qui sont installés en défensive durant la nuit.

A l’aube du 7 juin 1944, les Allemands poursuivent les tirs dans le secteur de l’écluse. Les parachutistes du Fallschirmjäger Regiment 6 provenant de Carentan harcèlent les Américains qui commencent à manquer de munitions. A 6 heures 30, un avion transportant du ravitaillement survole La Barquette et effectue un largage au profit du colonel Johnson, mais les containers sont parachutés dans les marais battus par les feux et ne peuvent être récupérés. L’après-midi, vers 15 heures, les parachutistes américains décèlent des soldats approchant depuis le nord-est qui ne peuvent être immédiatement identifiés : il s’agit de soldats allemands en provenance de Vierville qui se replient vers Carentan. Johnson, en interdiction face au sud, réarticule son dispositif afin de prendre en compte le nord-est de l’écluse et se prépare à ouvrir le feu sur l’adversaire qui traverse les terrains inondés. Lorsque les Allemands sont à environ 350 mètres, il ordonne le déclenchement des tirs : surpris, leurs adversaires ripostent et se camouflent autant que possible dans les herbes hautes aux alentours. Ils tirent une fusée éclairante qui déclenche peu après un nouveau barrage d’artillerie sur l’écluse. Quelques dizaines de minutes plus tard, alors que les munitions s’épuisent, le colonel Johnson ordonne l’arrêt du tir. Pour le chef de corps du 501st PIR, les Allemands veulent se rendre : il demande deux volontaires équipés d’un drapeau orange et progresse à la rencontre de ses adversaires quand soudain les tirs reprennent, le blessant ainsi qu’un de ses hommes. Les trois militaires sont alors obligés de ramper sur un peu plus de 100 mètres pour retrouver leur ligne.

Les tirs se poursuivent durant 30 minutes supplémentaires avant que le colonel Johnson ordonne à nouveau l’arrêt des tirs afin de laisser aux Allemands une chance de se rendre. Toujours accompagné par deux parachutistes, il parvient cette fois à établir la liaison avec deux soldats allemands qui souhaitent se rendre : cependant, les officiers leur interdisent toute reddition et menacent de les exécuter. Johnson fait alors passer le message suivant dans le camp adverse : ils disposent de 30 minutes pour se rendre, en cas de revus ils seront neutralisés par une force largement supérieure. Les tirs sur la ligne de front se poursuivent mais au bout d’une demi-heure, plusieurs dizaines de soldats allemands commandés par un lieutenant-colonel se rendent aux Américains. Lors de cet engagement, qui a vu la perte de 10 tués et 30 blessés dans les rangs du colonel Johnson, près de 150 Allemands ont été mis hors d’état de combattre.

La situation n’étant toujours pas stabilisée à l’écluse de La Barquette, Johnson et ses hommes sont maintenus en défensive dans ce secteur durant toute la journée du 8 juin. En soirée, les parachutistes américains sont relevés sur position par les soldats aérotransportés du 327th Glider Infantry Regiment.

Les premières heures du 10 juin 1944 marquent le lancement de l’offensive des troupes aéroportées et aérotransportées américaines visant à s’emparer de Carentan : le 327th GIR traverse la Douve et la menace qui pèse sur l’écluse de la Barquette s’éloigne définitivement.

Photos de La Barquette en 1944 

Cartes de La Barquette :

Image : carte de la commune de La Barquette