Esquay-Notre-Dame (Calvados)
Cote 112 – Hill 112

Les villes de Normandie pendant les combats de 1944

Le 15 juillet 1944 dans le secteur de la cote 112 à proximité d'Esquay-Notre-Dame, un Quad Gun Tractor britannique tractant un canon antichar Ordnance QF 17 pounder (76,2 mm) a été détruit par les tirs allemands. Le véhicule et le canon terminent de se consumer. Photo : IWM B7439

Le 15 juillet 1944 dans le secteur de la cote 112 à proximité d’Esquay-Notre-Dame, un Quad Gun Tractor britannique tractant un canon antichar Ordnance QF 17 pounder (76,2 mm) a été détruit
par les tirs allemands. Le véhicule et le canon terminent de se consumer.
Photo : IWM B7439

Libération : 4 août 1944

Unités engagées :

Drapeau anglais 11th Armoured Division

Drapeau anglais 15th (Scottish) Infantry Division

Drapeau anglais 43rd (Wessex) Infantry Division

Drapeau nazi 9. SS-Panzer-Division « Hohenstaufen »

Drapeau nazi 10. SS-Panzer-Division « Frundsberg »

Historique :

Le village d’Esquay-Notre-Dame (en 1944 baptisé uniquement « Esquay ») est situé à onze kilomètres à vol d’oiseau de Caen. Il se trouve en contre-pente au Sud-Est d’un léger mouvement de terrain culminant à 112 mètres d’altitude, dominant à la fois la vallée de l’Orne et la vallée de l’Odon. Cette hauteur, désormais connue comme la cote 112 (« hill 112 » pour les Anglophones), est surmontée du lieu-dit des Filandriers. C’est un véritable point clé des environs, dont le contrôle assure la liberté d’action dans la région au sud de Caen.

Un mois après le début de l’offensive Overlord, les forces anglo-canadiennes restent dans l’impossibilité de s’emparer de Caen et multiplient les opérations sanglantes pour en repousser définitivement les Allemands. A cet effet, ils tentent à plusieurs reprises de contourner la ville mais sans succès. Le 28 juin en début d’après-midi, lors de l’opération Epsom, la cote 112 est atteinte une première fois par les fantassins du 8th Battalion The Rifle Brigade de la 11th Armoured Division, appuyés par des chars du 3rd Royal Tank Regiment. Mais les Allemands de la 9. SS-Panzer-Division contre-attaquent dans le secteur et repoussent leurs adversaires plus au nord, leur infligeant de lourdes pertes et réoccupant « Hill 112 ».

 Le 10 juillet 1944, Esquay est tenu par le 2e bataillon du SS-Panzergrenadier Regiment 21 (9. SS-Panzer-Division). Le 3e bataillon est quant à lui installé dans le secteur de la cote 112, profitant de la vue pour identifier les mouvements alliés à l’Est et à l’Ouest de Caen, en particulier dans le secteur de vallée de l’Odon où les Britanniques cherchent à installer une solide tête de pont. Ce même jour à 5 heures du matin, un puissant tir d’artillerie allié s’abat sur le secteur d’Esquay et du lieu-dit des Filandriers, en préparation de l’opération Jupiter. Dans la foulée, les soldats de la 129th Infantry Brigade (43rd Infantry Division) quittent leur base d’assaut et se ruent dans la bataille en plein découvert, rappelant les meurtriers combats de la Première Guerre mondiale. Malgré les tirs de barrage allemands, les Britanniques poursuivent courageusement leur effort. Le 5th Battalion Wiltshire Regiment a pour mission de s’emparer d’Esquay tandis que le 4th Battalion Somerset Light Infantry doit enlever la cote 112. Les SS de la 9. « Hohenstaufen » laissent passer les premiers fantassins adverses avant de les attaquer à revers : les Britanniques ne parviennent pas à dépasser la Croix des Filandriers, à 1 500 mètres de leur point de départ.

En début de soirée, le 5th Battalion, Duke of Cornwall’s Light Infantry, jusqu’alors en réserve, part à l’assaut en direction du bois Carré qui se situe sur le flanc est de la cote 112 (que les Allemands appellent le bois des « demi arbres » en raison des effets de l’artillerie, active dans le secteur depuis la fin du mois de juin). Pris sous le feu des mitrailleuses et des canons allemands, il subit à son tour de lourdes pertes et les blessés sont évacués vers l’arrière tant bien que mal. Le bois Carré est atteint par les Britanniques qui s’y enterrent à la tombée de la nuit pour se protéger des obus et des contre-attaques adverses. Ces dernières se prolongent sans discontinuer jusqu’au lendemain matin. Le capitaine (à titre temporaire) David Willcocks du 5th Duke of Cornwall’s s’est tout particulièrement illustré pendant cette nuit de combats en demandant et guidant des tirs d’artillerie qui ont infligé de lourdes pertes et brisé les attaques allemandes. 250 pertes sont à déplorer pour son régiment pendant la nuit, notamment son chef de corps et un des commandants d’unité. Il a pris le commandement de l’état-major du régiment et a organisé la défense, permettant à ses hommes de tenir bon dans la tempête d’acier qui s’abattait sur eux. Pour cette action, il a été décoré de la Military Cross, l’une des plus prestigieuses médailles militaires de l’armée britannique.

La pression est telle que les Britanniques n’ont que le choix du repli s’ils veulent conserver des hommes et du matériel pour relancer l’action plus tard. Appuyés par les chars Sherman appartenant aux Scot Greys, les hommes de la 43rd Infantry Division battent en retraite jusqu’à leur point de départ pendant toute l’après-midi du 11 juillet 1944. En l’espace de 36 heures, les Britanniques perdent près de 2 000 soldats, tués, blessés, portés disparus ou prisonniers. Ce lourd rapport a pour conséquence un manque en moyens humains durant les jours qui suivent pour les forces britanniques, qui doivent rééquiper leurs unités en hommes et en matériel au plus vite. Les pertes allemandes sont inconnues.

Si les Britanniques ne sont pas restés sur la cote 112, les Allemands ne sont pas non plus parvenus à y retourner. La colline devient alors un « no man’s land » dont les hauteurs ne profitent à personne. Seul point positif de l’opération Jupiter pour les Alliés, l’attaque a fixé la 9. SS-Panzer-Division sur le front, l’empêchant d’être renforcée en hommes et en équipements alors que les Allemands voulaient la placer en réserve suite à cette offensive. Esquay est quasiment entièrement détruit par les bombardements successifs et sert régulièrement de point de regroupement ou de base de départ aux actions des divisions blindées allemandes.

Le village subit une nouvelle préparation d’artillerie le 15 juillet à 21 heures 30 à l’occasion de l’opération Greenline. Les Ecossais du 2nd Glasgow Highlanders (15th Infantry Division) ne sont plus qu’à 300 mètres au Nord d’Esquay lorsqu’ils subissent des premiers tirs d’artillerie adverses : appuyés par des chars lance-flammes Churchill Crocodile, les fantassins obtiennent la reddition de plusieurs soldats du 3e bataillon du SS-Panzergrenadier Regiment 21. Esquay est atteint mais les Ecossais sont repoussés par une contre-attaque menée par le 5e escadron du SS-Panzer Regiment 10 (10. SS-Panzer-Division). Au matin du 16 juillet, l’intervention de la Luftwaffe permet une nouvelle contre-attaque allemande : Esquay est réinvesti par le 1er bataillon du SS-Panzergrenadier Regiment 19 (9. SS-Panzer-Division). Cependant, la cote 113 à 400 mètres à l’Ouest du village tombe aux mains du 6th King’s Own Scottish Borderers (15. Infantry Division), fragilisant la position allemande à Esquay.

Avec les premiers succès de l’opération Bluecoat lancée le 30 juillet, les Allemands craignent un effondrement du front suivi d’un encerclement de leurs forces au Sud-Ouest de Caen s’ils ne forment pas rapidement une nouvelle ligne de défense à l’Est de l’Orne. Ils se replient progressivement, abandonnant la cote 112 et le village d’Esquay aux Britanniques qui s’en emparent le 4 août.

Carte d’Esquay-Notre-Dame :