Combat de Coudray, près de Chateau-Gontier (MAYENNE)

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private Vini
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Combat de Coudray, près de Chateau-Gontier (MAYENNE)

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Bonjour à tous,

Toujours dans le cadre de mes recherches sur l'histoire de mon département pendant la WW2, je vous propose ce témoignage très intéressant :

Voici le récit sur les combats de la Libération Coudray qui aurait pu se terminer tragiquement.
Nous sommes le 7 août 1944, Château-Gontier vient d'être libéré après de violents combats. Les Allemands se sont repliés sur Coudray où ils forment une poche de résistance forte de 2 000 hommes.

Narration de Marc Vallée de ce que fut le combat de Coudray, d'après le témoignage de M. Folliot, ancien cultivateur à la Gaignerie, chef du groupe de Résistance de Coudray, ancien combattant et grand blessé de la guerre 1914-1918.

"Les positions allemandes vers Château-Gontier, au début de l'attaque américaine, paraissent avoir été les suivantes : 1° des sentinelles avancées, devant le petit bois, qui, lorsqu'on arrive de Château-Gontier, se trouve un peu avant les allées d'Ingrandes à gauche, et d'Aigremont à droite ; 2° un groupe de soldats allemands, dans le bois ; 3° une mitrailleuse, au bout de l'allée d'Ingrandes ou de l'allée d'Aigremont ; 4° une première ligne, le long du petit cours d'eau, s'étendant à sa gauche, vers la Mayenne, jusqu'au- delà de la ferme située près du dit petit cours d'eau, et, à sa droite, au-delà de la vieille route d'Angers ; 5° des soldats éparpillés tout le long des fossés de la route, dans la côte de la ferme du Domaine ; 6° plusieurs canons de 55, au sommet de la côte de Coudray, d'autres canons couvrant les deux autres côtés vulnérables, côtés opposés sud et est, en tout une dizaine de pièces d'artillerie.

Plus, bien entendu, les autres troupes allemandes tenues en réserve au bourg, et celles qui couvraient Coudray, côté route de Daon au sud et côté route de Châtelain à l'est, la Mayenne à l'ouest, les protégeant.

Vers 18 heures 30, la colonne américaine qui, d'Azé, s'est avancée route de Coudray, arrive à 2 km de l'agglomération même du bourg de Coudray, à hauteur du château d'Ingrandes et de la ferme voisine du Domaine, qui se trouve à quelque 100 m plus loin vers Coudray.

Cette colonne est forte seulement de cinq cents hommes environ, les troupes de renfort ayant été laissées aux abords de Château-Gontier. Mais elle est dotée d'un armement très supérieur à celui des Allemands, et de tanks.

De ce point, on distingue parfaitement le clocher de Coudray, en haut d'une forte côte, sur la route toute droite...

Depuis une certaine distance, les Américains avancent avec beaucoup de circonspection et de prudence, les soldats suivant les chars, qui vont au ralenti, et marchant dans les fossés de la route.

18 heures 45, premier contact et bref engagement: les sentinelles avancées et le groupe de soldats allemands gardant le petit bois, sont rapidement éliminés : tournés, faits prisonniers et évacués vers l'arrière!

De ce point, en tout cas, les Américains tiennent sous le feu de leurs canons la route de Château-Gontier Coudray Daon Cherré, qui, à cet endroit, sur la rive opposée, longe presque la rivière et qui, de ce côté gauche de la Mayenne, est pour les Allemands de Coudray la seule voie de retraite possible vers Angers et la Loire ou vers l'est...

Mais à Coudray, en fin de soirée, presque à la nuit tombante, un événement se produit qui va brusquer l'issue du combat.

Un jeune étudiant de 21 ans, originaire de Nancy et "réfractaire", nommé Bertin, hébergé à Coudray, sorti sur la rue à l'occasion d'une accalmie du tir américain, se fait, pour un très futile motif, arrêté par les Allemands.

Fouillé, il est trouvé porteur d'une de ces "chansons anglaises" qui circulaient alors : ordre est donné de, sur-le-champ, le fusiller.

On le pousse brutalement contre un mur, devant une maison du bourg..., lorsque, juste à ce moment, tombe et explose dans la rue un obus américain !

Le Commandant allemand, qui se trouve sur les lieux, est tué sur le coup, tandis que s'écoule, grièvement blessé, le soldat chargé de l'exécution, et que Bertin est lui- même gravement atteint.

Ce qui lui sauve la vie ! Les soldats allemands le transportent dans une maison voisine, l'étendent sur un lit et le font soigner par leur médecin militaire, en même temps que les autres blessés !

Mais cette mort de leur chef provoque soudain chez les Allemands une aussi brusque que totale démoralisation, qui amène leur dislocation.

Cet homme énergique et dur, leur Commandant, ainsi tué, la confiance disparaît chez les soldats, et en même temps, leur discipline... Ils n'ont plus qu'une idée : celle de fuir.

Ainsi va être évitée la reprise sanglante des combats pour le lendemain matin, et peut-être la destruction totale du bourg de Coudray.

Dès la nuit tombée, les diverses formations commencent leurs préparatifs de départ ; certains groupes s'en vont même isolément déjà.

Les Allemands chargent leurs blessés et... leurs morts dans les camions, et après avoir, selon les habitants, longuement "traînés dans le bourg", abandonnant parti de leur armement, fusils, fusils-mitrailleurs, un canon anti-char et de nombreuses caisses d'obus, des cartouches et des mines, laissant également sur place une automitrailleuse, quatre camions, deux automobiles absolument intactes et en état de marche, mais démoniaque idée, ils en garnissent une de mines, ils se retirent, sans omettre toute fois de miner la route derrière eux, et refluent définitivement cette fois, battant en retraite, en une vrai débâcle, vers Daon et Châteauneuf, c'est-à-dire vers la Sarthe et l'est...

A l'aube du lendemain, mardi 8 août 1944, les forces américaines de la rive gauche, celles qui ont bivouaqué à Azé, sérieusement renforcées, se reportent en avant route de Coudray, en vue d'attaquer à nouveau..., lorsque de Coudray, on accourt les prévenir, qu'au cours de la nuit les Allemands ont déguerpi !

La colonne américaine entre donc sans coup férir, à Coudray, déjà pavoisée par les habitants : elle est reçue avec des transports de joie et un délirant enthousiasme, accueillie avec une véritable frénésie !

Le Colonel américain conseille de retirer les drapeaux, car ses forces ne font que passer, et sans doute y a-t-il encore, en arrière, des groupes d'Allemands, moins importants certes, mais toujours à craindre...

En cette brillante matinée du 8 août 1944, les colonnes américaines des deux rives se retrouvent bientôt ainsi, à hauteur de Daon, chacune de son côté et sans pouvoir se rejoindre.

Mais un premier soldat américain est, hélas, tué net en descendant la côte d'Ingrandes...

Tout à coup, peu après avoir dépassé l'allée du même nom, les tanks se trouvent pris sous le feu de l'artillerie allemande : le char de tête est, dès le début, complètement immobilisé, en plein milieu de la route ; puis le second, puis le troisième sont atteints, et doivent, à grand- peine rebrousser chemin jusqu'au-delà du chemin de ?la Bouvouze", sans avoir pu neutraliser la mitrailleuse en position à hauteur même de cette allée d'Ingrandes, parfaitement camouflée et terriblement gênante.

La ferme du Domaine est immédiatement canonnée par les tanks américains, et le bourg de Coudray par l'artillerie.

Les Allemands se retirent alors de leurs positions du "Domaine" non sans avoir au préalable allumé l'incendie et mis le feu à cette importante ferme.

Bien que les trois tanks de tête soient hors de combat, les Américains se portent à nouveau en avant, dépassent Ingrandes à gauche, et prennent Aigremont, un peu plus loin à droite.

Mettant alors en batterie trois canons dans l'allée de la ferme du "Domaine" et postant trois tanks lourds, les seuls qui restent, dans le champ qui se trouve de l'autre côté de la route, ils se remettent, de là, à canonner Coudray et ses environs immédiats.

Dans un seul champ voisin du bourg, on peut compter une vingtaine d'éclatement d'obus.

L'église et plusieurs maisons sont endommagées par un obus, et une femme, restée chez elle, est gravement blessée par les éclats, tandis qu'à la ferme Folliot, "La Gaignerie", un hangar est détruit par un obus incendiaire, avec la plus grande partie du matériel agricole qu'il abritait.

Pendant près de 3 heures, jusqu'à la tombée de la nuit, les Américains ne cessent de tirer, au canon et à la mitrailleuse !

... Il y a beaucoup de blessés parmi les troupes allemandes à Coudray, ce que peuvent constater plusieurs habitants qui furent témoins directs des faits.

Et le lendemain, de nombreuses capotes gris-vert, transpercées et sanglantes, devaient être trouvées abandonnées dans les maisons du bourg...

Quoi qu'il en soit, à la tombée de la nuit, il y a toujours résistance aussi opiniâtre des Allemands !

Ce que voyant, les Américains n'insistent pas : ils se retirent sur Azé, où ils décident de bivouaquer, ne laissant sur place que quelques éléments. L'attaque sera reprise le lendemain à l'aube...

En même temps qu'il se sont avancés sur Coudray par la rive gauche de la Mayenne, c'est-à-dire par la route directe partant d'Azé, les Américains ont également envoyé un détachement motorisé par la rive droite, c'est-à-dire par la route de Ménil, jusqu'à Daon, à 16 km de Château- Gontier, en vue de traverser si possible en cet endroit, la rivière, de tourner ainsi le corps allemand de Coudray, le prendre à revers et lui couper la retraite...

Ce détachement américain, remontant la rive droite, s'avance jusqu'à hauteur du pont de Daon.

Mais la veille même, dimanche 6 août 1944, à 10 heures 30 du matin, une équipe du génie allemand a réussi à faire sauter ce bel ouvrage, qui, d'un seul coup et entièrement, s'est écrouler dans les flots...

"La libération de Coudray s'est malheureusement soldée par la mort de quatre civils innocents : Pierre Bruneau, Antoine Delefortrie, Marcel Guedon et Marcel Guedon (ils n'étaient, semble-t-il, pas parents). Ils furent fusillés le 7 août 1944 dans un fossé situé face à Ingrandes. Sur le monument érigé en 1945, à 2,5 km du bourg de Coudray, le nom d'une cinquième victime fut inscrit : celui de Marius Schimpf, tué lors du bombardement de la route de Sablé. Deux des fusillés avaient été arrêtés par les Allemands, le matin même, puis enfermés dans une maison de Coudray d'où ils s'étaient échappés...

Le jeudi 10 août, une patrouille de F. F. I., de la section de Pontabry, effectua une battue sur la route d'Azé à Coudray de 7 à 13 heures. Des Allemands furent repérés dans le bois d'Ingrandes. Le lendemain, dès 8 heures, les F. F. I. commandés par Landelle, chef de section, se rendirent à Coudray pour désamorcer des mines et récupérer armes et munitions laissées par l'ennemi."

Cordialement,
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