Saint-Denis-le-Gast (Manche)
Les villes de Normandie pendant les combats de 1944
Deux « tankistes » américains inspectent un char allemand SdKfz 161 Panzerkampfwagen IV, numéroté 831 et neutralisé dans Saint-Denis-le-Gast par les hommes du 41st Infantry Regiment le 29 juillet 1944. L’un des soldats montre le point d’entrée de l’obus ayant pénétré la tourelle, à l’emplacement du chiffre « 1 ».
Photo : US National Archives
Libération : 30 juillet 1944
Unités engagées :
41st Infantry Regiment, Combat Command B, 2nd Armored Division
41st Infantry Regiment, Combat Command B, 2nd Armored Division
702nd Tank Destroyer Battalion
Historique :
Le 20 juillet, durant les préparatifs de l’opération Cobra, la 2nd Armored Division reçoit pour mission, à travers l’ordre en cours d’action numéro 4, de s’emparer de Saint-Denis-le-Gast après avoir dépassé une série d’objectifs.
Le 28 juillet, deux jours seulement après le début de son engagement, la division blindée américaine réalise une impressionnante percée, contournant par l’est une partie des forces allemandes de la Panzer Lehr Division, prise au piège dans la « poche de Roncey ». Vers 15 heures, les éléments de pointe du Combat Command B (CCB) reçoivent l’ordre d’installer des barrages routiers sur l’axe entre Saint-Denis-le-Gast et Lengronne : le but est de couper aux Allemands toute possibilité d’exfiltration vers le sud.
Le 29 juillet, dans la matinée, les premiers éléments de reconnaissance appartenant au 41st Infantry Regiment abordent Saint-Denis-le-Gast par l’ouest. Le village est encore occupé par les Allemands : un semi-chenillé américain, équipé d’un canon de 37 mm, se met aussitôt en batterie. A bord du half-track, le sergent désigne les objectifs : les servants neutralisent rapidement un canon antichar allemand ainsi qu’un char Panzer IV, identifié « 831 » (8e compagnie), ayant percé le blindage de la tourelle et tuant le chef de bord. Quelques minutes plus tard, les premiers blindés de l’escadron A du 67th Armored Regiment atteignent Saint-Denis-le-Gast et s’apprêtent à engager le combat, alertés par les tirs du canon antichar. Le char M4 Sherman du lieutenant Clifton Roe ouvre le feu dans la direction dangereuse mais l’un de ses obus tombe trop court : il heurte de plein fouet le sergent américain à bord de son semi-chenillé, le tuant sur le coup.
Cette tragédie n’est pas la seule à se dérouler à Saint-Denis-le-Gast dans l’après-midi du 29 juillet. Lors de la reconnaissance du village, à proximité du Panzer IV neutralisé, la tension est particulièrement élevée dans les rangs américains. Observant du mouvement derrière une fenêtre à l’étage d’une maison, le Private Gilbert V. White ouvre le feu avec son arme individuelle, pensant à un tireur isolé allemand : malheureusement, il s’agissait de madame Alexandre Guenier, 61 ans, touchée de plusieurs éclats de verre. Elle meurt finalement de ses blessures quelques instants plus tard.
Afin de sécuriser la ligne entre Saint-Denis-le-Gast et Lengronne, l’escadron A conserve un de ses pelotons dans Saint-Denis, renforcé par un chasseur de chars TD M-10 du 702nd Tank Destroyer Battalion et des fantassins de la compagnie B du 41st Infantry Regiment. Ils doivent interdire tout retraite allemande en provenance de la poche de Roncey : leur secteur est mis en alerte aux dernières heures du jour, des bruits de chars en provenance du nord se faisant entendre. Installés aux abords extérieurs de la commune, les Américains installent en périmètre défensif s’appuyant sur les champs et vergers, formant une nasse dans laquelle ils sont en mesure d’ouvrir le feu sur tout ennemi s’y engouffrant.
Lorsque l’obscurité est totale, une colonne allemande tente sa chance et emprunte la route reliant Saint-Denis-le-Gast à Saint-Martin-de-Cenilly. A deux heures du matin en ce 30 juillet, l’équipage d’un char M5 de l’escadron A, commandé par le Sergeant Charles Douglas Tanner, est stationné dans Saint-Denis face au nord lorsqu’il détecte le véhicule de tête de la colonne adverse : il s’agit d’un canon automoteur allemand. Ouvrant le feu avec son canon de 37 mm, il est aussitôt pris à partie par la colonne, notamment par des Panzerfaust que tirent les fantassins débarqués. Un important combat à courte distance débute aussitôt, semant la panique dans les rangs américains : des fusées éclairantes sont tirées, faisant apparaître des ombres mouvantes dans et aux abords du village. Les Allemands ouvrent le feu de toutes leurs armes, obligeant les combattants américains au mieux à baisser la tête lors de leur passage, au pire à abandonner leurs positions. Les soldats de la compagnie B se replient finalement à l’extérieur du village, dans un désordre complet. Une poignée d’entre eux résistent malgré tout, tenant bon face au déferlement d’acier qui s’abat sur eux.
Vers 3 heures 15 du matin, le véhicule du sergent Tanner est touché pour la deuxième fois, un obus atteignant la tourelle et le blessant grièvement. Son pilote, John Kapanowski, l’extrait du blindé en proie aux flammes mais il ne peut sauver Tanner qui décède à proximité de son char. Les Allemands en profitent pour reprendre le village et sécuriser l’axe pour évacuer un maximum de leurs troupes. Au moins cinq blindés, deux semi-chenillés et plus d’une centaine de fantassins allemands parviennent à traverser Saint-Denis-le-Gast durant la nuit.
Au lever du jour, les fantassins américains s’engagent prudemment dans la commune, appuyés par un Tank Destroyer, craignant que leur adversaire défende encore Saint-Denis. Mais les Allemands ont abandonné le village et se sont exfiltrés à la faveur de la nuit. La 2nd Armored Division en profite pour se remettre en condition et ravitailler ses unités avant la suite des opérations.
Le sergent Tanner a été décoré de la Silver Star et de la Croix de Guerre à titre posthume pour sa résistance héroïque dans Saint-Denis-le-Gast aux premières heures du 30 juillet 1944.
Carte de Saint-Denis-le-Gast :
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