The Forced Suicide of
Field Marshall Rommel, 1944
Le fils de Rommel, Manfred, avait 15 ans en juillet 1944 quand son père fut grièvement blessé par un avion anglais. manfred avait été incorporé dans une batterie de défense anti aérienne de la Wehrmacht.
Le 14 octobre, il reçut l'autorisation d'aller voir son père en convalescence dans leur maison d'Herrlingen près de Stuttgart. Toute la famille connaissait les soupçons qui pesaient sur le feld maréchal depuis que des comploteurs de l'atentat du 20 juillet (César von Hofsacker notamment) avaient lâché son nom... Son chef d'Etat major et un de ses anciens commandants avaient déjà été éxécutés.
Récit de Manfred sur la dernière journée de son père :
"... je suis arrivé à Herrlingen à 7 heures du matin. Mon père prenait son petit déjeuner. On m'apporta une tasse et nous avons terminé le petit déjeuner ensemble. Puis nous avons fait une promenade dans le jardin. "A midi, deux généraux vont venir me parler de ma future affectation" m'informa mon père en préambule. "Ce jour va décider de ce que sera mon destin ; soit le tribunal du peuple, ou un commandement à l'Est." "Accepterais tu un poste à l'Est? " demandai je.
Il me prit par le bras et répondit : "Mon garçon, notre ennemi à l'Est est si terrible que toute considération personnelle doit s'effacer devant lui.S'il envahit toute l'Europe, même temporairement, ce sera la fin de tout ce qui semble valoir d'être vécu. Donc, bien sûr que j'irai."
Peu avant midi, mon père monta à sa chambre au premier étage et changea son costume civil brun qu'il portait avec ses culottes de cheval, pour sa veste de l'Afrika Korps, qui était son uniforme favori à cause de son col ouvert.
A midi, une voiture vert foncée portant une plaque de Berlin s'est arrêté devant la grille de notre et râblé, et le général Maisel, grand et mince, sont descendus de la voiture et sont entrés dans la maison. Ils étaient plein de respects et très courtois. Ils ont demandé à parler à Rommel seul à seul. Aldinger et moi avons quitté la pièce. "ils ne vont pas l'arrêter" ai je pensé avec soulagement en montant dans ma chambre chercher un livre.
Quelques minutes plus tard, j'ai entendu mon père monter à la chambre de ma mère. Anxieux de connaître ce qui se préparait, je me suis levé et je l'ai suivi. Il se tenait au milieu de la pièce, le visage très pâle. "Sors un moment avec moi" me dit il d'une voix ferme. Nous marchâmes jusqu'à ma chambre. "je viens de dire à ta mère" commença t'il lentement, "que dans un quart d'heure je serai mort." Calmement, il continua, "mourir de la main de quelqu'un de son propre peuple est difficile. La maison est cernée et Hitler m'accuse de haute trahison. En respect pour mes états de service en Afrique "souligna t'il ironiquement, "on me laisse la "chance" de m'empoisonner. Les deux généraux en ont apporté avec eux. Ce sera fait en trois secondes. Si j'accepte, aucune des mesures habituelles ne sera prise contre ma famille, c'est à dire contre vous. Ils laisseront également mon Etat major tranquille."
"Vous y croyez?" demandai je. "Oui" répliqua t'il, "je le crois, c'est trop dans leur intérêt que toute cette affaire ne s'ébruite pas trop. D'ailleurs, on me demande de te faire promettre de garder le silence le plus absolu. Si un seul mot transpire, ils ne se sentiront plus tenus par ce marché." J'essayai encore : "ne peut on se défendre?" il m'interrompit ; "c'est sans issue, c'est mieux qu'un seul meurt plutôt que nous soyons tous tués." Nous nous sommes brièvement dit adieu. "Demande à Aldinger de venir s'il te plait..."
Aldinger avait été attiré dans une discussion avec l'ecorte des généraux afin qu'il se tienne éloigné de mon père. Lorsque je l'appelais, il se précipita dans l'escalier. Lui aussi fut saisi d'effroi quand il apprit ce qui se tramait.
Mon père s'adressa rapidement à lui. Il lui redit combien il était inutile d'essayer de résister ; " Ils ont tout prévu dans les moindres détails. On me fera des funérailes nationales. J'ai demandéà ce que cela ait lieu à Ulm. Dans un quart d'heure, vous recevrez un coup de téléphone de l'Hôpital de Ulm vous informant que j'avais fait une embolie cérébrale en merendant à la conférence." Il consulta sa montre. "je dois y aller, ils ne m'ont laissé que 10 minutes. Il prit brièvement congé de nous à nouveau. Nous le suivîmes dans l'escalier. je l'ai aidé à enfiler son manteau de cuir. Soudain, il sortit son portefeuille ; "Il y a 150 marks dedans ; dois je les prendre avec moi?" " Cela n'a plus d'importance à présent Herr feld Marshal" dit Aldinger.
Mon père a remis doucement son portefeuille dans sa poche. Lorsqu'il traversa le hall, son petit chien qu'il avait ramené de France lui sauta de joie autour des jambes. "Manfred, enferme le chien dans le bureau." Il m'attendit dans l'entrée avec Aldinger tandis que je poussai le chien dans le bureau. Puis nous sortîmes ensemble. Les deux généraux se tenaient près de la grille d'entrée. On a marché vers eux dans l'allée ; sous nos pas, le gravier semblait crisser incroyablement bruyamment. A notre approche, les deux généraux tendirent le bras et saluèrent. "Herr Feld marschal" dit Burgdorf en se plaçant près de mon père. Quelques villageois étaient groupés au bord de la route. La voiture était prête. Le conducteur SS ouvrit la portière et se mit au garde à vous. Mon père glissa son bâton de maréchal sous son bras et, le visage toujours aussi pâle, nous tendit à Aldinger et à moi sa main avant de grimper en voiture.
Les deux généraux montèrent à leur tour et les portières claquèrent. Mon père ne jeta pas un regard en arrière lorsque la voiture s'éloigna et disparut au premier virage. Quand elle fut loin, Aldinger et moi rentrâmes silencieusement à la maison.
20 minutes plus tard, le téléphone sonnait. Aldinger répondit et la nouvelle de la mort de mon père devint officielle. Ce qui lui était réellement arrivé n'est pas totalement clair. Nous avons appris plus tard que la voiture s'était arrêtée à quelques centaines de mètres en contrebas de la maison en bordure d'un bois. Des hommes de la Gestapo venus en nombre de Berlin, surveillaient la zone avec ordre de tuer mon père et de prendre notre maison d'assaut en cas de résistance. Maisel et le chauffeur sont sortis de la voiture, laissant mon père et Burgdorf à l'intérieur. Quand le conducteur est revenu 10 minutes plus tard, il a vu mon père affaissé, sans casquette et son bâton de maréchal à ses pieds.
D'après Liddel Hart.
Une des toutes dernières photos de Rommel, avec sa femme et et Manfred à Herrlingen.
