Nouvelle hypothèse concernant le massacre de la prison de Caen le 6 juin 1944

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Marc Laurenceau
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Nouvelle hypothèse concernant le massacre de la prison de Caen le 6 juin 1944

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Massacre à la prison de Caen. Jean Quellien, historien, produit des documents et une piste inédits
Après les révélations d’un cheminot et le témoignage du fils d’un chef de la Prison de Caen, l’historien Jean Quellien précise des faits et évoque une nouvelle hypothèse


Source : Liberté Le Bonhomme Libre Caen
Auteur : Emile Fouda
Date de publication : 29 décembre 2017
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Après les révélations d’un cheminot, ami de l’un des fossoyeurs appréhendés en 1944 par les Nazis et le témoignage du fils d’un chef de la Prison de Caen, l’historien Jean Quellien précise des faits et expose une nouvelle hypothèse…

"Episodes précédents
Rappel des épisodes précédents. Depuis plus de 70 ans, le mystère du massacre de la prison de Caen, en juin 1944, demeure. En août 2017, un cheminot Jacques P., confie à Liberté de Normandie ce qu’il considère comme une révélation relative aux « fusillés de la prison de Caen ». Il dit alors avoir été ami et confident d’Eugène VIEZ, un camarade cheminot, qui lui avait confié savoir où se trouveraient les corps des résistants fusillés le 6 juin 1944. Eugène Viez aurait déclaré avoir été raflé par les soldats allemands au cours d’une projection de film au Trianon, à Caen. Jacques P. conservera cette confidence dans son intimité pendant une trentaine d’années.

Acte deux. À la diffusion de cet article, le fils, 5 ans au moment des faits, d’un surveillant chef de la prison de Caen témoigne à son tour. Il ne comprenait pas pourquoi ni sa mère, témoin des événements, et « toujours vivante, il y a encore trois ans » ni lui-même, n’avaient jamais été contactés par les historiens pour écrire sur ce mystère. Entre-temps, un autre fils de témoins de l’époque, Eugène Viez, dont on recherchait l’existence apparaît et confirme les propos rapportés par Jacques P.

Acte trois. Les historiens caennais, dont Jean Quellien professeur émérite de la faculté d’histoire de l’université de Caen, se sentant mis en cause décident de « rétablir les faits tels qu’ils sont, documents à l’appui ».

Fragilité des témoignages.

Depuis plusieurs années, Jean Quellien spécialiste de la 2e Guerre Mondiale en Normandie s’intéresse aux destins des résistants, partisans et autres patriotes… La question des fusillés de la prison de Caen est devenue une préoccupation suite au livre « Massacres nazis en Normandie » (Ed. Charles Corlet), coécrit avec Jacques Vico, Combattant Volontaire de la Résistance, Vice-Président d’Honneur de la Fondation de la Résistance. Une figure du devoir de mémoire.
D’abord l’historien précise son périmètre d’intervention : « je m’intéressais à qui ils étaient » et son ami « aux corps ». Ensuite il relève la fragilité des témoignages parus tout l’été dans nos colonnes de Liberté de Normandie : d’aucuns parlent d’un château d’eau, qui aurait pu être un colombier, ou inversement » pour localiser à Louvigny une destination probable des corps des fusillés de la prison. Jean Quellien s’étonne de l’indication « Trianon », qui aurait été ouverte alors même que les Alliés bombardaient à tout va la ville. Difficile d’imaginer ici « des jeunes gens se réfugier dans un cinéma sous les bombes »

Exécutions en plusieurs fois
L’historien a recoupé les informations disponibles pour tenter de comprendre ce qui s’est passé ce fameux 6 juin 1944 à la Prison de Caen.

L’ordre était venu de la Gestapo de Rouen pour effacer les traces des résistants. On sait maintenant précisément quand ont été exécutés les hommes. Les exécutions ont eu lieu au moins le matin, sinon également l’après-midi ».

Les corps sont ensuite enterrés dans les courettes. Ils devaient être relevés par un groupe de 6 à 8 prisonniers venus d’Alençon pour faire « le sale boulot ». Deux survivants identifiés ont laissé des témoignages soit chez le juge d’instruction soit dans la presse.

Le procès-verbal du 22 août 1944 détaille les notes du juge d’instruction Berlemont : l’environnement intérieur de la prison comprend un ensemble de plusieurs courettes dont sept sont mentionnées dans le rapport du juge : la première ne comporte pas de fosse. Mais sur le mur du fond, on distingue des impacts de balles, des débris de matières cérébrales collées aux fenêtres… Partout des traînées de sang… La courette n° 2 offre de visualiser au centre de la pelouse « une fosse comblée est visible ». Non loin, de la chaux, une brosse, du matériel nécessaire pour badigeonner les corps et anticiper probablement des odeurs de pourrissement.

La courette n°3
Un autre emplacement identifié comme une fosse comblée est visible sur le gazon. Encore des traces d’impact de balles… Le juge a détaillé cette vision macabre qui s’est présentée à lui en venant constater les « dégâts » après la débâcle… Plus de deux mois après le débarquement.

La seule inconnue
Il n y aurait pas d’affaire du « massacre de la prison de Caen » si on avait pu identifier avec précisions où les corps avaient pu être ensevelis, brûlés, déversés ? Ont-ils été disséminés dans la campagne normande, le long de la route de Carpiquet vers Bayeux ? Ont-ils été déversés dans les trous laissés béants par les bombes sur la piste de Carpiquet, dont l’urgence de réemploi avait exigé le remblaiement immédiat ? Jean Quellien se pose des questions en prenant pour base des informations ce qu’il sait de la situation de l’ennemi au moment du débarquement mais aussi ce qu’il déduit des témoignages vraisemblables de certains prisonniers d’Alençon.

Selon un de ces témoignages, les détenus d’Alençon se souvenaient avoir pu identifier une pancarte indiquant Pont de saint Brieucq. Dans les environs de Caen, une telle « information » ne relèverait que d’une confusion entre Pont Brieu, que l’historien situe non loin du Pont de Coudray, à quelques encablures d’une ferme identifiée comme un repaire de collaborateurs pendant la guerre… À suivre."
Marc Laurenceau
Webmaster du site DDay-Overlord et du forum
Auteur du livre Jour J Heure par Heure

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