Revenons donc fin août 44, le 20 se referme l'étau des alliés sur la poche de falaise, bloquant une grande partie de la 7e armée allemande.
Mais malgré le feu soutenu sur la poche par les alliés, beaucoup de troupes allemandes comme les parachutistes, les Waffen SS et des nuitées blindées ont réussi a échapper a l'encerclement et font route vers la seine, vers ROUEN exactement.....
Comme nous pouvons l'imaginer c'est la débandade totale, les grenadiers s'agrippants au 1er blindé ou camion qui passe afin de rejoindre au plus vite ROUEN et à passer les ponts de la seine.
Les blindés légers et lourds essayent d'aller le plus vite possible.
Ils y a quand même quelques chars Panther, Tigres et Tigre royal qui ont réussi à échapper a la fournaise, et leurs équipages ne les ménagent pas niveau mécanique....
Le blindé qui nous intéresse est celui du SS.Unterscharfuhrer REISSKE, chef de char du Tigre I n°224 de la SS s.Pz ABT 102.
Voila plus de 6 jours qu'il est coincé avec son équipage et son Tigre dans la poche, les Tigres de sa section ont été anéantis soit en combat, soit par le tirs des "Jabos"...
Et avec quelques autres blindés, le Tigre 224 a enfin trouvé un chemin de sortie de l'enfer de la poche de Falaise, et comme les autres il prends la direction de Rouen via Vimoutiers.
Mais le terrain normand n'est plus comme la plaine de Caen, mais fait de grandes et dures montées, puis de descentes dangereuses.
L’équipage du Tigre 224 comme bien d'autres ont bien réussi à trouver de l'essence dans les chars abandonnés, mais le gros problème est la maintenance mécanique de leur monstre, d'habitude c'est la vérification du Tigre matin et soir, mais rien n'a été fait depuis plusieurs jours....
A savoir que le moteur Maybach d'un char Tigre doit être sous surveillance tout les jours au combat, car la consommation d'huile est énorme et les risques de chauffe et de casse moteur sont a prévoir a tout moments.
Et c'est ce qui est malheureusement arrivé a grands nombres d'entres eux lors du repli vers Rouen, rien que sur la route de Vimoutiers ont pouvais dénombrer nombres de chars lourds allemands avec leurs moteurs cassés puis détruit par leur équipage....
A l'entrée de Vimoutiers ce fut d'abord un Tigre Royal qui resta sur place et fut déplacé par les alliés dans le fossé, a la suite d'une casse moteur et de la destruction du monstre par son équipage :

Mais revenons a notre Tigre n°224, REISSKE viens d'apprendre comme les autres chefs de char, qu'il y a un dépôt d'essence situé a quelques kilomètres de Vimoutiers au château de l'horloge et comme il en reste très peu, il active la marche de son char.
Mais arriva ce qu'il arriva, après la terrible cote de Canapville, le moteur du 224 a pris un sérieux coup de chauffe, le Tigre continuera bien son chemin encore 2 a 3 kilomètres mais le moteur rends l'âme a 300 mètres de Vimoutiers.
REISSKE et son équipage tentent bien de réparer, mais il y a trop de dégâts " le moteur est serré ", et c'est la mort dans l'âme qu'ils placent 2 charges explosives dans leur Tigre, une a la base de la tourelle et l'autre sur le moteur...
Mais cela ne détruit que peu le Tigre : la 1ère fausse la tourelle et l'autre abîmé légèrement le moteur, c'est donc impuissant que REISSKE et ses hommes laissent leur char Tigre 224 au milieu de route et s'en vont a pieds en direction de Rouen comme toute l'armée allemande...
Le char Tigre 224 est maintenant seul au milieu de la route, et après avoir vu les derniers soldats allemands se repliés vers Rouen, ce sont maintenant les soldats alliés qui passe devant sa carcasse...
Génant leur progression, le Tigre 224 sera comme son congénère le Royal, mis dans le fossé par des bulldozers, et restera des années dans celui-ci...
Le Tigre Royal fut emporté rapidement, mais le Tigre 224 lui restera 30 ans dans le même fossé...
Le Tigre 224 agonisant dans son fossé dans les années 70 :




Un ferrailleur du coin en fit l'acquisition et commença a découper le 224 au chalumeau, on en voit d'ailleurs les cicatrices sur la tourelle qui est découpée en deux.
Beaucoup de pièces du 224 ont disparu lors de son séjour de 30 années dans son fossé, mais grâce a cela a été difficile aux ferrailleurs de travailler sur le monstre, le laissant dans l’état que l'on connait a ce jour.
Dans les années 70 la ville de Vimoutiers décida de racheter le 224 au prix de 6000 francs soit 914,69 Euros, grâce au dénouement de 2 personnes : un ancien de la 2e DB, Michel Dufresne, et Eddy Florentin bien connue pour son ouvrage "Stalingrad en Normandie"...
En 1975 Monsieur Alain Roudeix commença la restauration du Tigre 224,
et en 1er lieu remis en état le train de roulement du monstre d'acier.
Puis fit démonter la tourelle et ensuite après 2 heures d'efforts sous la pluie, dans la boue, et extrait le tigre du fossé avec l'aide de 3 bulldozers.
La preuve en photos :



Apres avoir été reconnu et classé monument historique dans la même année 75, le Tigre fut placé sur un terrassement en gravier car il n'a plus de plancher, ni de suspension et toutes les trappes d’accès furent soudées et enfin reçu une peinture fraîche...
Le char Tigre de Vimoutiers avant l'installation du socle en béton :

Et ce n'est que quelques années plus tard qu'il lui fut prépare un socle en béton et placé là où il se trouve maintenant, juste a coté du fossé et de la route où il rendit l'âme...

Il est bon a savoir qu'il n'existe que 2 Tigre I en France, notre 224 a Vimoutiers et celui du musé de Saumur, et ils sont sortis l'un et l'autre cote a cote de la chaîne de montage, n°de série du 224 : 251 113 et celui de Saumur : 251 114, et bien sur ils appartenaient à la même unité a savoir la SS s.Pz Abt 102, et que notre Tigre 224 est le seul au monde a être équipe d'un petit frein de bouche au bout du canon, exactement le même que les Jadpanthers...
A savoir aussi de notre Tigre 224 que ses plaques moteurs sont celles d'un Panzer IV, et qu'il est équipe de chenilles de combat....
Alors si vous passez aux alentours de Vimoutiers, allez voir le Tigre I n°224, et regardez le avec respect, il le mérite sans aucun problème...
Au prochain reportage, A+ phil