L’histoire des Rangers en Normandie revisitée par Hollywood

Canon 15 cm sFH18 installé sur un encuvement de la batterie des Perruques à Maisy, codée Stp 83 par les Allemands. Ce canon n'est pas d'origine. Photo (2010) : D-Day Overlord

Canon 15 cm sFH18 installé sur un encuvement de la batterie des Perruques à Maisy, codée Stp 83 par les Allemands. Ce lieu sera utilisé pour le tournage de la série américaine « Legendary Locations » qui s’intéresse à l’histoire des Rangers en Normandie. Photo : D-Day Overlord

25 septembre 2018 : L’histoire des Rangers en Normandie revisitée par Hollywood
Auteur :
Marc Laurenceau

Le film Le Jour le plus long, qui a largement participé à populariser le débarquement de Normandie, a illustré l’assaut époustouflant de la batterie de la Pointe du Hoc le 6 juin 1944 par les Américains du 2nd Ranger Battalion commandés par le lieutenant colonel James E. Rudder. Les images de ces commandos, les fameux Rangers, escaladant les falaises de 30 mètres et découvrant avec stupeur une batterie sans canons, ont forgé la mémoire collective du D-Day.

Des Rangers américains du 2nd Ranger Battalion savourent un moment de répit après de durs combats livrés à la Pointe du Hoc. Deux parachutistes du I/506th Parachute Infantry Regiment (101st Airborne Division) ont participé aux combats : Ray Crouch et Len Goodgall. Parachutés par erreur dans le secteur, ils ont renforcé les Rangers avant de rejoindre leur unité après le 8 juin 1944. Len Goodgall et son insigne de division sont visibles sur cette photo, sous le drapeau avec la croix rouge. Un commando anglais, l'officier de liaison Thomas Trevor, peut également être vu en bas à droite, avec un bandeau blanc sur le visage. Photo : US National Archives

Des Rangers américains du 2nd Ranger Battalion savourent un moment de répit après de durs combats livrés à la Pointe du Hoc. Deux parachutistes du I/506th Parachute Infantry Regiment (101st Airborne Division) ont participé aux combats : Ray Crouch et Len Goodgall. Parachutés par erreur dans le secteur, ils ont renforcé les Rangers avant de rejoindre leur unité après le 8 juin 1944. Len Goodgall et son insigne de division sont visibles sur cette photo, sous le drapeau avec la croix rouge. Un commando anglais, l’officier de liaison Thomas Trevor, peut également être vu en bas à droite, avec un bandeau blanc sur le visage.

Aujourd’hui, les récits historiques s’affinent. La redécouverte du site de la batterie de Maisy aux yeux du grand public en janvier 2006 avait d’ores-et-déjà sonné comme un coup de tonnerre en Normandie, occasionnant de houleux débats dans le monde des historiens. Au-delà du site en lui-même, oublié des livres d’histoire et des circuits touristiques, c’est la bataille qui s’y était déroulée le 9 juin 1944 qui avait été purement et simplement évincée des créations historiques.

Cependant, les sites de Maisy et de la Pointe du Hoc possèdent un point commun : ils ont tous deux été pris d’assaut par les Rangers, avec des combats d’une rare intensité, à quelques jours d’intervalle. Plus important encore, ces deux assauts successifs sont liés par un seul et même ordre d’opération.
C’est cette réalité historique qu’une série historique américaine, baptisée « Legendary Locations », veut corriger. En s’appuyant sur les livres de Gary Sterne (propriétaire de la batterie de Maisy) Cover-Up at Omaha Beach: D-Day, The US Rangers, and the Untold Story of Maisy Battery, publié en 2016, mais également sur l’ouvrage Cover Up at Pointe du Hoc: The History of the 2nd & 5th US Army Rangers 1943 – 10th June 1944 (à paraître en 2019), le réalisateur de cette émission veut retracer l’engagement des commandos Américains du 6 au 10 juin 1944 entre Omaha Beach, la Pointe du Hoc et la batterie de Maisy.

Le tournage se déroule en octobre 2018 sur le site de la batterie de Maisy et l’émission devrait être diffusée le mois suivant aux Etats-Unis. Les réalisateurs recherchent d’ailleurs des figurants en tenue d’époque (Rangers et Wehrmacht), qui doivent disposer de l’uniforme complet ainsi que de l’armement et les équipements (pour se porter volontaire, envoyer ses coordonnées et au moins une photo par mail à truebrit61@icloud.com).

Cérémonie à la batterie de Maisy le 9 juin 2017 à l’occasion du 73ème anniversaire de l’assaut du point fortifié allemand par le 5th Ranger Battalion. Photo : Association D-Day Overlord

Deux principaux points historiques soulevés par ces études sont effectivement nouveaux et bouleversent les idées reçues. Selon Gary Sterne, s’appuyant sur des plans réalisés par les services de renseignements américains en mai 1944, quelques jours avant le D-Day (qui détaillent précisément que ces pièces d’artillerie avaient été retirées plus au sud), les Rangers ne pouvaient pas ignorer que les canons de la Pointe du Hoc avaient été déplacés. Mais cette information, ayant été communiquée trop tardivement à l’état-major du général Eisenhower, n’a pu modifier les plans d’attaques tels qu’imaginés initialement.

Le deuxième point concerne le plan d’opération des Rangers, dont le groupement était placé à ce moment sous le commandement de la 1st (US) Infantry Division. Les hommes du 2nd et 5th Ranger Battalions devaient ainsi s’emparer de la Pointe du Hoc, puis dans la foulée de la batterie de Maisy, cette dernière étant considérée au final comme potentiellement plus dangereuse. Les imprévus de l’assaut du 6 juin ayant considérablement mis à mal les plans initiaux, l’assaut des canons de Maisy n’a pu être réalisé que le 9 juin 1944, dans de douloureuses conditions.

L’histoire ne s’écrit jamais définitivement, comme le prouve cet aboutissement de longues années de recherche.

Une casemate modèle R621 à la batterie de Maisy, codée Stp 83 par les Allemands et installée au lieu-dit Les Perruques. Photo (2010) : D-Day Overlord

Une casemate modèle R621 à la batterie de Maisy, codée Stp 83 par les Allemands et installée au lieu-dit Les Perruques. Photo (2010) : DR

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