– Lieu : des Dunes-de-Varreville à La Madeleine
– Horaire : 06h30 – Jour J
– After Action Reports – Rapports après action
– Unité alliée : 4e D.I. US
– Unité allemande : 709e division d’infanterie
Utah Beach est l’une des deux plages de débarquement prévues pour les Américains le Jour-J. Son existence, seul secteur d’assaut dans le Cotentin, relève d’un choix opératif du général anglais Bernard Montgomery qui souhaitait établir une tête de pont directement dans le Cotentin afin de s’emparer plus rapidement de Cherbourg et de son précieux port en eau profonde.
Les forces en présence
Deux secteurs de plage sont créés sur Utah : Uncle Red et Tare Green, situés entre les villages des Dunes-de-Varreville au nord et de La Madeleine au sud. Ces plages sont défendues par la 709e division d’infanterie allemande qui dispose de 7 points d’appui dans le secteur qui nous intéresse. Deux batteries d’artillerie, situées à Montebourg et Saint-Marcouf, menacent la côte mais également le large de leur feu, les canons de ces deux positions ayant une portée de près de 30 kilomètres.
C’est la 7e armée du Major General J. Lawton Collins qui doit se lancer à l’assaut d’Utah Beach le Jour J. Cette armée se compose des 8e, 22e et 12e régiments d’infanterie de la 4e division d’infanterie américaine sous les ordres du Major General Raymond O. Barton. Ces unités sont chargées de s’emparer de la plage, d’y établir une solide tête de pont et d’effectuer dans un premier temps la jonction avec les troupes parachutistes des 82e et 101e divisions aéroportées.
Les soldats américains embarquent dans les péniches d’assaut à l’aube. Photo : US National Archives |
L’assaut doit se faire tôt le matin, à 6 heures 30, un horaire qui correspond au moment où la marée est la plus basse : les Alliés choisissent volontairement ce moment car les défenses de plages installées par les Allemands sont bien visibles à marée basse. Ainsi, les soldats du génie peuvent dégager des brèches sur la plage afin de faire débarquer les renforts au profit des premières vagues d’assaut.
Après s’être placé dans les barges, les soldats américains attendent l’ordre du départ. Photo : US National Archives |
L’assaut
Le mardi 6 juin, à 3 heures du matin, la Task Force U (Utah) arrive au large des secteurs de plage du Cotentin et mouille à environ 18 kilomètres de la côte, une distance qui limite l’efficacité du tir des batteries allemandes.
Le lever du soleil s’effectue à 5 heures 58 exactement, 28 minutes après le début du bombardement des positions allemandes par les navires alliés. Ce déluge de feu fait suite au bombardement aérien des côtes du Calvados et du Cotentin réalisé par des bombardiers anglo-américains.
Vague d’assaut américaine se préparant à débarquer sur la côte. Photo : US National Archives |
Les soldats américains des 1st et 2nd Battalions (8th Infantry Regiment, 4th Infantry Division) qui se sont placés dans des barges de débarquement assistent à ces bombardements qui labourent le sol français et emplissent le ciel d’immenses panaches de fumée. Même si beaucoup d’entre eux souffrent d’un terrible mal de mer, ils sont soulagés de voir les côtes qu’ils doivent attaquer quelques minutes plus tard sous une telle pluie d’acier.
Une péniche d’assaut fait route vers Utah Beach. Photo : US National Archives |
Deux escadrons de chars amphibies « duplex drive » sont mis à l’eau à trois kilomètres du rivage et doivent rejoindre les secteurs de plage par leurs propres moyens grâce à deux hélices et une jupe de caoutchouc. Ils progressent en deux vagues d’assaut : la première composée de douze chars « duplex drive » et la seconde de seize chars identiques).
Mais les blindés amphibies prennent du retard et sont bientôt dépassés par les barges de débarquement du 2nd Battalion qui prennent la tête de l’offensive sur le secteur de plage « Uncle Red ».
La première vague touche enfin le sol d’Utah Beach. Photo : US National Archives |
Le 2nd Battalion débarque sur le secteur « Uncle Red » au sud-est de Saint-Martin-de-Varreville. Le 1st Battalion débarque quinze minutes plus tard sur le secteur de plage « Tare Green », à l’est de Saint-Martin-de-Varreville, simultanément avec les chars amphibies appartenant aux escadrons A et B du 70th Tank Battalion. Ces derniers atteignent la plage et engagent aussitôt les positions adverses.
Pendant les premières minutes du débarquement de la 4e division d’infanterie sur Utah Beach, les tirs allemands sont nourris mais peu précis. Progressivement, les mitrailleuses allemandes laissent la place aux explosions aléatoires mais meurtrières des obus tirés par des canons de campagne appartenant à la 709e division d’infanterie allemande.
Vue aérienne du débarquement américain sur Utah Beach. Photo : US National Archives |
Ces canons ouvrent le feu depuis des positions situées quelques kilomètres à l’ouest de la plage de débarquement (notamment près du manoir de Brécourt) et sont camouflées de manière à ce que les avions alliés qui patrouillent dans le ciel normand ne les repèrent pas.
Très rapidement, la plage est sous contrôle. La marée est basse et découvre les défenses de plages sur une distance de près de 300 mètres entre les dunes et la mer. La cinquième vague d’assaut débarque une demi-heure après l’Heure H. A 7 heures 30, les soldats du génie ont ouvert des brèches à travers les obstacles de plage permettant ainsi aux péniches de débarquement d’approcher sans encombre.
Plan d’Utah Beach
(cliquer sur l’image pour l’agrandir)
Arrivée en Normandie d’éléments de la 4e division d’infanterie américaine. Photo : US National Archives |
Un fort courant marin
Le général de brigade Théodore Roosevelt Jr., fils aîné du président des Etats-Unis Théodore Roosevelt, débarque avec la première vague d’assaut. Le Major General Raymond O. Barton, réalise très vite, après avoir discuté avec ses officiers d’état-major, que le courant marin a déporté les péniches d’assaut et que les soldats américains débarquent deux kilomètres au sud du point initialement prévu sur le plan d’invasion. En effet, ils ne se trouvent pas au nord de la Madeleine comme convenu mais bien au sud de ce village, face au point d’appui allemand W5.
Débarquement des renforts en hommes, matériel et véhicules sur Utah Beach. Photo : US National Archives |
Seule une route permet de rejoindre l’intérieur des terres à partir de ce secteur de plage, tandis qu’au nord de cet emplacement, il y en a trois de plus. La question est posée : les renforts débarqueront-ils sur la plage prévue par le plan où débarqueront-ils au sud du village de la Madeleine ? Barton indique que les renforts doivent suivre les troupes d’assaut quel que soit le point de débarquement.
Un point fortifié allemand détruit par les bombardements alliés. Photo : US National Archives |
Les tentatives de percées vers le nord sont repoussées par les forces allemandes, appuyées par les tirs des batteries de Montebourg et de Saint-Marcouf. Le Major General Barton décide d’avancer à l’intérieur des terres en empruntant cette seule route dont il dispose, malgré les risques d’encombrements. En effet, 30 000 soldats américains et 3 500 véhicules doivent être débarqués dans la journée sur Utah Beach et le simple chemin de campagne, lancé entre les terrains inondés par les Allemands, semble insuffisant pour supporter un tel effectif.
Un véhicule américain débarque sur Utah Beach. Photo : US National Archives |
Pendant ce temps, les chars américains attendent que les artificiers du génie militaire détruisent les murs antichars, avant de poursuivre leur progression. Deux heures après l’Heure H, à 8 heures 30, ils traversent la dune et font mouvement vers l’intérieur des terres.
Une équipe de brancardiers américains débarque à son tour sur la plage à peine sécurisée. Photo : US National Archives |
Si les tirs d’armes légères sont devenus rares sur la plage, les explosions de mortiers et de l’artillerie allemande continuent de tuer. Ce harcèlement désespéré de la part des Allemands continue jusqu’en fin de soirée.
Un obus tiré par un canon allemand explose sur la plage d’Utah pendant le débarquement. Photo : US National Archives |
Bilan
A la fin de la journée du 6 juin 1944 sur Utah Beach, 1 700 véhicules et près de 23 250 soldats américains ont débarqué. Le bilan des pertes atteint 197 tués et 60 disparus.
Progression des Américains le long de la sortie numéro 1. Photo : US National Archives |
Les chars amphibies ont apporté une aide essentielle sur cette plage, offrant un appui-feu immédiat au profit de l’infanterie dès la phase de débarquement (durant laquelle le rapport de force est particulièrement défavorable pour l’assaillant) et lors de la progression à l’intérieur des terres. Les Allemands ont été impressionnés de voir débarquer des blindés, ce qui a sérieusement entamé leur moral et a réduit leur valeur combattante. 28 des 32 chars prévus pour l’assaut de la première vague ont réussi à débarquer, nettoyant les points d’appui allemands avec une importante puissance de feu.
Des soldats américains dans des « trous de souris », parés à une éventuelle contre-attaque allemande. Photo : US National Archives |
A compter de midi, les troupes débarquées effectuent leur jonction avec les troupes parachutées des 82e et 101e Airborne Division. Le débarquement sur le secteur d’Utah Beach est celui qui a compté le moins de pertes humaines et matérielles par rapport aux quatre autres secteurs de plages.
Les troupes débarquées en route vers l’intérieur des terres. Photo : US National Archives |