Présentation générale des préparatifs du débarquement de Normandie
Le COSSAC
Pour monter l’opération qui doit ouvrir un nouveau front à l’ouest de l’Europe, les Alliés mettent sur pied une organisation réunissant le plus grand nombre de spécialistes des opérations combinées.
C’est ainsi que le COSSAC voit le jour le 14 janvier 1943 lors de la conférence interalliés de Casablanca. Il s’agit de la fonction de « Chief of Staff to the Supreme Allied Commander« , chef d’état-major du commandement suprême allié, personnalisé par le général anglais Frederick E. Morgan, lui-même secondé par le général américain Ray Barker.
Les missions du COSSAC sont les suivantes : choisir le lieu exact de débarquement, trouver des solutions aux problèmes de transport de troupes et enfin collecter un maximum d’enseignements tirés des opérations amphibies combinées déjà menées (aussi bien les raids comme celui de l’opération Biting – ou raid de Bruneval – que les opérations en Afrique du nord – « Sledghammer » et « Torch » – à Dieppe – « Jubilee » – et en Italie).
Choix de la Normandie
Le COSSAC doit tout d’abord définir le lieu d’invasion à l’ouest de l’Europe. Les avis sont très partagés au sein des militaires alliés. La décision se porte finalement sur les côtes du nord de la France, en Normandie, à proximité immédiate de l’Angleterre. Cette stratégie est présentée en août 1943 lors de la conférence de Québec : la Normandie est le point de départ de l’invasion alliée à l’ouest de l’Europe.
Voici les raisons : les côtes bretonnes sont trop éloignées de l’Angleterre pour être abordées, les terres en Hollande sont inondées et ne permettent pas la mise en place d’une tête de pont solide, les courants des côtes belges sont très forts et donc dangereux, et surtout les Allemands attendent les Alliés dans le Pas-de-Calais car le bras de mer entre l’Angleterre et la France est, à cet endroit, le plus réduit.
Les plages normandes sont en grande majorité des plages sableuses, même si l’on y trouve également des galets. Cette composition des plages normandes est relativement proche de celles de l’ouest de l’Angleterre : ainsi, les soldats peuvent s’entraîner outre-Manche et les capacités de franchissement des chars en manœuvre sur ce type particulier de sable peuvent également être testés.
L’Angleterre comme base militaire
Pour réaliser l’opération Overlord alors en préparation, les généraux alliés s’accordent sur la nécessité d’une concentration de troupes en Grande-Bretagne en prévision d’une invasion de plus grande envergure de la France, opération surnommée « Round-up » (Rassemblement).
Dans un premier temps, dans le cadre de la préparation de l’invasion, les armées alliées doivent s’équiper, se former, s’entraîner, pour mener à bien des missions diverses et précises. Les troupes américaines et canadiennes profitent des installations militaires sur leur sol, mais il faut déjà penser à l’acheminement du matériel et des hommes en Angleterre, base de lancement pour l’attaque en Normandie.
A partir de la fin 1942, les premiers navires de transports quittent le continent nord-américain et gagnent la Grande-Bretagne. Une lutte intense anti-sous-marine commence dans l’Atlantique entre les navires de surface alliés et les sous-marins U-Boote allemands.
Mais à partir de 1943, la bataille semble gagnée par les Anglo-américains qui coulent de plus en plus de bâtiments appartenant aux forces de l’Axe, alors que les officiers mariniers allemands détruisent de moins en moins de convois alliés.
Une fois débarqués en Angleterre, les soldats alliés sont installés à divers endroits du pays, tandis que le matériel (chars, véhicules de transport, canons…) est stocké dans des bases tenues soigneusement secrètes.
Dans le cadre des préparatifs du Jour-J, le programme économique des prêts-bails bat son plein, et les Américains livrent des centaines de véhicules, des bâtiments de guerre, et de l’armement individuel aux Britanniques, en l’échange de l’utilisation de terres occupées jusqu’alors par les troupes du Commonwealth. Le parc militaire britannique s’agrandit, tandis que les industries de l’armement situées aux Etats-Unis fonctionnent à plein régime.
Le travail des avions de reconnaissance alliés est considérable : les photographies prises par ces derniers apportent des renseignements importants aux stratèges anglo-américains, qui organisent en conséquence les entraînements des forces alliées. De nombreux pilotes d’avions et de planeurs sont formés, très souvent des exercices amphibies sont organisés, et des parachutages par tous les temps sont effectués au-dessus de l’Angleterre.
La naissance du SHAEF
Mais rapidement, les Alliés sont confrontés au manque de pouvoirs du COSSAC. Cette situation pèse lourdement dans la prise de décisions stratégiques et les différents membres du COSSAC s’accordent pour mettre en place un nouvel organe décisionnaire dirigé par un seul et même chef : le 6 décembre 1943 voit ainsi la naissance du SHAEF (Supreme Headquarters Allied Expeditionary Force : état-major suprême de la force expéditionnaire alliée). Le général américain Dwight Eisenhower est alors placé à sa tête, avec comme adjoint le maréchal de l’Air anglais Arthur Tedder.
Les forces aériennes alliées sont commandées par l’Air Chief Marshall Sir Trafford Leigh-Mallory ; les forces navales alliées sont quant à elles dirigées par l’amiral anglais Sir Bertram Ramsay ; les forces terrestres alliées sont sous les ordres du Field Marshal anglais Bernard Law Montgomery.
Le SHAEF compte plusieurs forces armées terrestres regroupées en trois groupes d’armées. En mai 1944, il s’agit des : 12th US Army Group (1st US Army, 3rd US Army, 9th US Army, 15th US Army) et 6th US Army Group (1ère armée française, 7th US Army), 21nd British Army Group (1st Canadian Army, 2nd British Army). Les forces aériennes alliées du SHAEF regroupent les 8th US Air Force, 9th US Air Force, Royal Air Force (RAF) 2nd Tactical Air Force, RAF Bomber Command et RAF Airborne & Transport Forces.
Les troupes alliées sont entraînées sans arrêt et leur moral est au beau fixe. Les bâtiments de guerre et de transport sont de plus en plus nombreux dans les ports britanniques et les raids aériens augmentent en intensité sur les côtes du nord-ouest de la France. En effet, le rivage français situé entre La Pallice au sud et Dunkerque au nord est constamment bombardé à partir de janvier 1944, et la fréquence de ces raids augmentera considérablement à partir de mai 1944.
Opération Fortitude
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Ce gigantesque rassemblement de troupes, de véhicules et de navires en Angleterre ne passe pas inaperçu et les Alliés le savent très bien. Les Allemands, qui comprennent rapidement qu’une vaste opération amphibie est en préparation, décident d’augmenter les effectifs des agents de renseignement positionnés en Angleterre.
Les Alliés, qui s’attendaient à ce genre de situation, ont préparé l’opération Fortitude, chargée de désinformer les services de renseignement allemands. Ainsi, une véritable « armée fantôme » va voir le jour en Angleterre, dotée de véhicules blindés gonflables et de canons en bois. Ces unités factices sont positionnées en masse en face du Pas-de-Calais, dans la région de Douvres. Les avions de reconnaissance allemands vont observer et photographier cette armée de leurres en pensant qu’il s’agit d’unités aux ordres du redouté général Patton, fin prêtes à débarquer dans le Pas-de-Calais.
Aussitôt, la XVème armée allemande, stationnée dans le Pas-de-Calais, est mise en alerte. Les Alliés sont désormais passés maîtres dans le domaine du renseignement et protègent ainsi parfaitement le bon déroulement des préparatifs du Débarquement de Normandie : le succès de l’opération Fortitude est total.
Résistance française
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Pour que ce débarquement en Normandie soit une réussite complète, les Alliés demandent aux réseaux de la résistance française de participer à la préparation de cette opération qui porte désormais le nom d’opération Overlord.
Les alertes sont envoyées aux résistants par l’intermédiaire de la radio : la BBC, lors de son émission française, émettait des messages codés qui avaient tous leur signification et leurs destinataires. Ainsi, le 1er juin 1944, les auditeurs de l’émission française de Radio-Londres peuvent entendre des messages annonçant la mise en alerte des différents réseaux, tels que l’un des vers de « Chansons d’Automne » de Charles Trenet, inspiré par Verlaine (« Les sanglots longs – Des Violons – De l’automne… »).
Dans la soirée du 5 juin 1944, alors que les Alliés ont lancé leurs troupes à l’assaut de la forteresse Europe, ils donnent l’ordre aux résistants de déclencher les sabotages dans les territoires occupés grâce à de nouveaux messages : pour le groupe « Ventriloquist » en Sologne, les trois prochains vers de ce poème (« Bercent mon coeur – D’une langueur – Monotone… ») signifient le début des actions de destruction : les résistants sabotent alors les chemins de fer, les lignes téléphoniques, installent des mines antichars sur les routes ou font simplement tomber les arbres sur les axes de communication. Dans la nuit du 5 au 6 juin 1944, près de 1 000 actions de sabotage sont effectuées par la résistance française.