L’opération Gambit pendant le débarquement de Normandie

Opération Neptune – Débarquement de Normandie

Opération Gambit : la traversée de la Manche par deux sous-marins miniatures de la Royal Navy du 4 au 6 juin 1944. Photo : IWM

Opération Gambit : la traversée de la Manche par deux sous-marins miniatures de la Royal Navy du 4 au 6 juin 1944.
Photo : IWM

Pour une poignée de marins britanniques de la Royal Navy, l’opération Overlord a déjà débuté dès le 2 juin 1944 à 21h30 en Angleterre : deux sous-marins de poche de classe « X » (le X20 commandé par le lieutenant Kenneth Hudspeth et le X23 aux ordres du lieutenant George Honour) larguent leurs amarres après avoir été remorqués par deux chalutiers, le Darthema et le Sapper. C’est le déclenchement de l’opération baptisée « Gambit ». Les deux équipages se composent de cinq hommes chacun. Leur mission consiste à baliser les routes d’accès de l’armada alliée. Au moment où ils quittent l’Angleterre, l’assaut amphibie et aéroporté allié est prévu de débuter le 5 juin 1944.
Les Américains, de leur côté, n’ont pas souhaité organiser de missions équivalentes pour leur propre secteur de responsabilité.

Les deux sous-marins sont à 20 miles des côtes françaises occupées dès le 4 juin 1944 à midi. Distants de 20 milles l’un de l’autre, ils font temporairement surface pour observer le rivage face à Sword Beach (Colleville-sur-Orne – aujourd’hui Colleville-Montgomery) et Juno Beach (Courseulles-sur-Mer et Bernières-sur-Mer). Lorsque la nuit tombe, à compter de 21h30, ils débutent la reconnaissance des zones de balisage, estimant que l’armada alliée arrivera pendant la nuit, conformément aux plans initiaux. Ils se préparent à déposer une série de balises lumineuses, sans chercher à s’économiser.

Le dispositif dont ils sont dotés se compose de plusieurs tiges télescopiques surmontés d’une lampe à éclats de couleur verte, d’une longueur totale de 5,5 mètres, visibles jusqu’à environ huit kilomètres. Ces balises sont installées manuellement, les membres d’équipage les mettant en place à l’aide de leur tenue de plongée. La durée des batteries étant limitée, ces balises doivent être actionnées sur ordre, à réception du mot-code « Padfoot« . A cet effet, les deux sous-marins sont équipés de radios dont les fréquences doivent être veillées en permanence.

Un sous-marin de classe "X" lors d'essais au Royaume-Unis dans le lac Striven, près de Rothesa. Photo : IWM A 22903

Un sous-marin de classe « X » lors d’essais au Royaume-Unis dans le lac Striven, près de Rothesa. Photo : IWM A 22903

Mais la météo, capricieuse, retarde l’opération Overlord de vingt-quatre heures. Prévenus du report par radio le 5 juin 1944 vers une heure du matin, grâce à un code radio transmis par la BBC, les sous-mariniers britanniques doivent prendre leur mal en patience une journée et une nuit de plus, espérant que ce délai ne soit pas à nouveau prolongé. Ils se posent au fond de la mer et débutent leur longue attente. Mais les conditions ne leur permettent pas de se reposer pleinement : l’espace exigu des sous-marins (environ 5 m²), la promiscuité et les odeurs sont des paramètres qui augmentent le niveau de difficulté de la mission, en plus de la fatigue qui s’accumule.

Lorsque le jour tombe ce 5 juin 1944, ils gagnent la surface et reprennent l’écoute radio. Vers une heure du matin, le mardi 6 juin 1944, ils observent l’armada alliée dont le bruit des moteurs se fait entendre à des kilomètres. Les masses sombres des navires se détachent clairement à l’horizon. A 4 heures 45, alors que la luminosité est de plus en plus forte, les sous-mariniers captent le mot-code « Padfoot » tant attendu. Ils se mettent aussitôt au travail et accomplissent leur mission vers 5 heures 20. De crainte d’être pris pour cible par l’armada alliée, le lieutenant George Honour fait installer un immense drapeau de la Royal Navy sur la structure de son sous-marin, afin d’être reconnu par les siens.

En fin d’après-midi du Jour-J, les deux sous-marins rejoignent le large et retrouvent avec délivrance les deux chalutiers, se frayant avec plus de peur que de mal un passage au milieu de l’imposant flotte alliée. Embarquant à bord des chaloupes, ils abandonnent les sous-marins qui sont tractés jusqu’en Angleterre. Ils ont passé quasiment quatre-vingt seize heures dans cet espace clos. Héros discrets du débarquement de Normandie, ils ont néanmoins joué un rôle prépondérant pour la marine de guerre alliée lors de l’opération Neptune, renseignant et guidant les navires alliés de Juno et Sword jusqu’à leurs objectifs.

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Auteur : Marc Laurenceau – Reproduction soumise à l’autorisation de l’auteur – Contact Webmaster